"Nous aurons, compte tenu de la diversité des positions, énormément de difficultés à dégager une majorité", a-t-il estimé devant la presse, au lendemain d'un tour de table sur le sujet avec ses homologues européens réunis à Bruxelles.
"Je doute fort que nous ayons le dispositif d'une nouvelle réforme avant l'extinction du régime actuel des quotas, c'est-à-dire au 30 juin 2006", a-t-il déclaré. Dix pays européens (Espagne, Italie, Irlande, Grèce, Portugal, Finlande, Lituanie, Lettonie, Hongrie, Slovénie) ont exprimé leurs craintes à l'égard du projet de réforme, dans une lettre remise lundi à la nouvelle commissaire européenne à l'Agriculture, Mariann Fischer Boel.
Ils réclament notamment le maintien de la répartition actuelle de la production "sur l'ensemble du territoire de l'Union européenne" et souhaitent que le fardeau des réductions de quotas soit porté essentiellement par les gros pays exportateurs nets, la France et l'Allemagne.
"Aujourd'hui, vous avez deux minorités de blocage possibles, ce qui veut dire que la situation n'est pas mûre pour cette réforme du sucre", a constaté mardi Hervé Gaymard. "Mon pronostic c'est qu'elle n'est pas prête d'être mûre, donc comme toujours en pareille hypothèse, c'est au dernier moment, dans un an et demi, que les choses se dessineront avec la plus grande clarté", a-t-il prédit.
Mme Fischer Boel a jugé à première vue "difficile" à satisfaire la revendication du maintien de la dispersion actuelle de la production européenne, avancée par les 10 pays opposés au projet mis sur la table en juillet par son prédécesseur Franz Fischler. Elle a réaffirmé qu'elle n'arrêterait ses propositions législatives de réforme qu'au printemps 2005, une fois tranché l'appel de la condamnation des aides européennes au sucre par un panel de l'Organisation mondiale du commerce.
La commissaire s'est fixée pour objectif d'arriver à un accord sur la réforme du sucre à temps pour la prochaine conférence ministérielle de l'OMC de décembre 2005 à Hong-Kong. La réunion visera à boucler les négociations commerciales multilatérales du cycle de Doha lancé en 2001 au Qatar.
"J'entends bien évidemment le souhait de Mariann Fischer Boel que, même si l'application est au 1er juillet 2006, qu'il y ait un accord politique avant décembre 2005", a répondu mardi M. Gaymard.
"C'est vrai que ce serait sans doute préférable pour Hong-Kong, mais je suis incapable de lire dans le marc de café", a-t-il ajouté. Le ministre a réaffirmé l'exigence de la France, premier producteur de l'Union européenne, d'un "maintien de la compétitivité de l'ensemble de (ses) activités sucrières" et d'une prise en compte des intérêts des départements d'outre-mer et des pays Afrique-Caraïbes-Pacifique (ACP), qui bénéficient du régime européen. Il a indiqué qu'il recevrait le 3 décembre à Paris des représentants des ACP. Le projet de réforme de M. Fischler prévoyait une baisse progressive d'un tiers des prix européens garantis d'ici fin 2007, trois fois plus élevés que les cours mondiaux, et une diminution des quotas de production, ramenés de 17,4 millions de tonnes par an à 14,6 millions en 2008/09. |